Ecoute, écoute, ma fille, qui je suis – La voix de la verticalité
Ecoute, ma fille, écoute qui je suis : je suis FEMME.
- Ecoute ma fille :
- Je suis cette enfant peu aimée
- Je suis cette adolescente inhibée
- Je suis cette folle jeunesse
- Je suis une Amazone, une guerrière,
- Je suis l’amante et l’Amoureuse
- Je suis fragile, triste, seule,
- Je suis sous emprise,
- Je suis en colère
Je suis le fruit de mes contradictions.
Je ne suis ni un exemple, ni une icone. Avant toi, – comme toi, peut-être -, j’ai dévoré le monde. Femme parfaite, j’ai oublié mes rêves.
La maternité a été une révélation inattendue. Je ne rêvais pas d’être mère, puis tu es arrivée, ma merveille !
Pour toi, par toi, ma fille, je suis devenue aimante. Une mère dévouée, défendant un nid où tu sois protégée, de tout, de tous, de moi ! J’ai contrôlé ma force, corseté mon univers, étouffé mes désirs, pour qu’aucune réalité n’entache ton cocon de tendresse. Pour que tu vives dans le palais des illusions le plus longtemps possible, qu’il ne te manque rien, que nul cauchemar ne trouble ton sommeil d’enfant.
Je ne t’ai jamais dit qui je suis, je me suis masquée des années durant. Rien ne devait te déranger.
Tu as commencé à danser, et je m’en suis réjouie.
Enfin quitté le nid, et je t’en félicite. Quelle que fut ma douleur.
2014, toi et tes sœurs avez eu 20 ans, je n’ai eu plus aucune raison de faire semblant !
Laisse-moi te raconter, ma beauté !
J’étais exténuée. Tordue physiquement et moralement, sous les 1000 contraintes professionnelles et personnelles. Asservie dans des rôles qui ne me convenaient plus. Absente à mon essence.
La dissociation entre la vie que je menais, et celle que je sais Mienne, est devenue intolérable, inextricable. Et mon corps a lâché pour que je ME rencontre.
Un Accident opératoire.
Je me suis réveillée paralysée, paraplégique, en fauteuil. Allongée, alitée, altérée, atterrée, mise à terre, immobile, dépendante. Plus Wonderwoman, plus mère, plus RIEN. Plus DEBOUT.
Une femme brisée, couchée ! Transpercée de 2 tiges de titane.
9 mois, de longues heures de solitude d’un hôpital, enfermée par mon corps, où j’ai pris le temps, d’écouter ma voix, celle que je muselais. Ma voix qui s’exprime, à travers moi, clairement aujourd’hui.
Ce qui m’est arrivé n’était pas la fin DU monde. Juste la fin d’un monde, d’une soumission effrayée et effrénée aux désirs des autres, qui avait fait son temps pour moi.
Temps était venu d’ouvrir un autre chemin, un passage, de franchir un seuil : le seuil de ma Vie ! Peut-être de la vôtre : Un choc quel qu’il soit, une remise en question profonde et l’absolue confiance en soi.
Oui, j’ai réappris à marcher. Comme une renaissance.
Peu à peu, lentement, on m’a redressée. Je me suis redressée, reverticalisée.
Pour être DEBOUT, il a fallu tâtonner, grandir, plier, tomber et se relever.
Vulnérable, demander du soutien, être assoiffée d’amour !
Formidable métaphore de la vie, pour une mise au monde, longue, et au forceps.
Parce que je t’ai mise au monde, j’ai pu me mettre au monde
Dans un monde, certes, délabré, déchiré, violent et inique. Mais un monde MAGNIFIQUE !
Où il n’y a ni échec ni réussite, ni regret, ni remords.
Je me pardonne mes errances. Qui sont, en fait, celles de tout être en cheminement vers soi même.
Libérée, je te libère, ma fille, mes filles, ma lignée, De toute empreinte. Je te lègue l’amour pour seul héritage.
Je rencontre ma puissance. En 2014, j’ai été blessée, diminuée, augmentée aussi. TRANSFORMÉE.
Le jour où je me suis donné de l’amour, du respect, de la tendresse, de la lumière, avec splendeur et justesse, sont apparues mon désir de vivre, ma créativité, ma légitimité, ma féminité.
Tout est devenu possible, tout le champ de mes possibles.
Je suis droite, Dans une verticale infinie, incarnée, alignée. Et pourtant, avec une autonomie réduite dans l’espace physique.
Je prends pleinement ma place. Dans une horizontalité libérée. Et pourtant, handicapée.
Par le corps, ce corps, autrement, et désormais mien, limité, et en douleur, mais DEBOUT !
Auquel l’esprit s’est allié, enchanté de ces retrouvailles, pour que je devienne écrivaine, avec une parole authentique et libre. Et le cœur ouvert et connecté. Enfin bienveillante, et enragée.
Pour m’ériger. Avec mes mots pour seules armes : Passeuse de mots
Alors voila, je vous dis, ce monde en péril nécessite que nos voix s’élèvent, que vos voix se lèvent
Désormais je me lève, je m’élève, Je regarde au loin et haut. Femme publique. Dans le monde.
Femme Flamme qui diffuse. Je m’élance.
Alors voila, je te dis, ma fille : forte de mes paradoxes, vulnérable et invincible, immobile et en mouvement, ancrée et flottante, aimante et aimée, et dans le bonheur profond d’être ENSEMBLE, je m’inscris dans la lignée des femmes puissantes, qui œuvrent avec justesse, et sont en train d’enfanter le monde, en enchantant la vie.
Je suis qui je suis. Je suis Femme, je suis Mère, Citoyenne et engagée. Je me lève et je marche avec toi. DEBOUT ensemble !
Nadalette La Fonta – DeboutCitoyennes – Eklore – Zénith – La voix de la verticalité – 8 Mars 2020